lundi 12 octobre 2009

SSC Napoli : Virages Ultras sensibles…



Pour la plupart des amateurs de football, Naples et son club mythique, la Società Sportiva Calcio Napoli, fondée en 1926, reste une ville et un club faits de passions, où la réputation des tifosi n’est plus à faire…


Une passion si excessive que les ultras napolitains ont été interdits de déplacements officiels durant toute la saison dernière…
Il faut dire que la « tifoseria » Napolitaine est sans cesse en mutation, donc moins perméable aux directives répressives des autorités italiennes.
Historiquement dans la cité parthénopéenne, c’est sous l’impulsion de Gennaro Montuori plus connu sous le surnom de « Palummella » que le mouvement ultra a pris véritablement son essor, avec la création du Commando Ultrà Curva B
Jusque dans les années 90 le CUCB de Palumella, avec ses 7000 membres encartés, sa propre émission de TV, son magasine « Ultr’Azzurro » vendu chaque mois à plus de 20 000 exemplaires et ses « tifos » gigantesque règne sans partage sur la « tifoseria » napolitaine.
Le départ de Palummella du CUCB annoncé le 6 Juin 2001 laissa la Curva B dans une situation conflictuelle du fait des dérives reprochés au CUCB et des antagonismes de plus en plus virulents au sein de la Curva. Les Ultras Napoli ont ainsi succédé au Commando Ultra’ en rejetant fortement tout l’aspect mercantile de son fonctionnement. Il faut d’ailleurs noter que (pratiquement tous) les groupes napolitains ne vendent plus d'écharpes et réservent leurs matériels (tee-shirt, sweats, casquettes…) à leur noyau et premier cercle.
Mais c’est depuis le début de ces années 90, que de la Curva A apparaissent d’autres groupes ultras, qui reviennent aux sources du mouvement en refusant toute discussion avec la direction du club napolitain et toutes compromissions avec ce qui ressemble à une quelconque autorité. Ces groupes extrêmement agressifs et autonomes se multiplient au fil du temps et développent une nouvelle forme de « tifoseria » napolitaine…
La Curva A qui a désormais acquis une réputation d’intransigeance vis-à-vis des dirigeants et surtout des ultras adverses, voit chaque saison grossir le nombre de ses sympathisants dans une multitude de groupes et de sous groupes parmi lesquels on trouve actuellement les Teste Matte, un groupe historique fondé en 1987 dont les membres proviennent essentiellement de Panuria, Quarto et du Quartiere Spagnolo, le NISS acronyme pour «Niente Incontri Solo Scontri», dont les membres proviennent pour la plupart de Rione Sanità, Pianura et Soccavo, deux groupes intimement liés, le second étant né d’une scission interne au premier à la suite de problème de leadership entre certains « capi » des TMN, Sud, Mastiffs, Brigata Carolina Quartiere Spagnolo, Fossato Flegreo, Vecchi Lions, Rione Sanità, Bronx et Nuova Guardia.
Unis face à l’ennemi, ces groupes peuvent pourtant se trouver opposés en interne. Certains y voient la « main » de la Camorra. De fait lors des graves incidents survenus lors du déplacement à Rome en Août de la saison dernière, un grand nombre des ultras napolitains interpellés par la Police avaient déjà des antécédents judiciaires en lien avec des groupes « camorristici »…
Les ultras napolitains avaient d’ailleurs organisé ensuite une manifestation d’ampleur pour protester contre cet amalgame fait par le Ministère de l’Intérieur en portant tous un tee-shirt sur lequel était inscrit « IO HO PRECEDENTI PENALI »…
On retrouvait dans l’enquête diligentée par la DIGOS, les noms des familles qui contrôlent une partie de la ville, en particulier la zone orientale, de Scampia à San Giovanni et Teduccio, de Secondigliano à Ponticelli. Le clan Contini, qui a son quartier général à San Giovanniello et dans les Rione Amicizia. Le clan Lo Russo qui contrôle le secteur entre Miano et Chiaiano. D’autres familles encore comme les Misso, Mazzarella, et les Amato-Pagano
La police après vérification, avait ainsi indiqué, que parmi les « tifosi » faisant l’objet d’une enquête au retour de ce « fameux déplacements » à Rome, 260 étaient fichés pour infractions aux lois sur les stupéfiants, 419 pour vol, cambriolages, 218 pour agressions, 70 pour détentions d’armes et 71 pour violations de lois sur l’ordre et la sûreté publique…
De plus des écoutes téléphoniques mise en place pour une enquête sur le clan Bocchetti (implanté à Secondigliano et Scampia) ont démontré qu’un des fils du parrain local était du déplacement vers la Capitale.
Ces écoutes ont aussi fait apparaître qu’un « camorriste » considéré comme un des principaux chefs du trafic de drogue du clan Amato-Pagano à Scampia est souvent en contact téléphonique avec le « capo » d'un des principaux groupes de la tifoseria de Naples, qui lui procure des billets et parfois lui organise des déplacements….
Ces liens plus ou moins définis ont donc ainsi des conséquences sur la situation interne de la Curva A, puisque c’est Giuseppe Misso, le parrain du clan de Rione Sanità qui a ordonné que la Masseria Cardone quitte la Curva sous la pression des Mastiffs…
Ceux de la Masseria ont alors cherché un nouvel emplacement dans San Paolo et c’est grâce à la médiation d'un autre clan « camorriste » celui de la famille Lo Russo, qu’ils ont pu rejoindre le secteur distinti (tribunes latérales) mais sans avoir cependant la possibilité de « bâcher »…
L’émergence de la « A » ne se fait pas aussi sans « heurts » avec la Curva B car il existe entre les deux « Curve » une divergence de vision sur la mentalité ultra’ : La «A» est une « curva » qui s’est voulue authentique, agitée, contestatrice, qui cherche systématiquement l’affrontement, la «B» (Ideale Ultras, Ultras ´72) est plus festive, donne priorité au « tifo », reste non violente et assez folklorique…à l’exception (historique) des Fedayn EAM 1979.
Depuis lors, autour du Stade San Paolo, comme lors des déplacements, les groupes de la Curva A vont systématiquement « au contact » avec les tifosi adverses ou les forces de police (carabinieri comme la DIGOS (Divisione investigazioni generali e operazioni speciali). Les affrontements sont récurrents et de plus en plus violents, permettant ainsi au fil des années à la Curva A de se faire une réputation de violences et d’intransigeance…
Contrairement à de nombreuses « tifoserie », aucun courant politique significatif n’est exprimé dans les travées du Stade San Paolo, même si les groupes de la Curva B pencheraient historiquement à gauche, tandis que ceux de la A seraient plutôt à droite….
Les « tifoserie » ennemies, nationales ou régionales ne manquent pas, comme celle du Hellas Vérone et les groupes d’extrême droite de la Curva Sud du Bentegodi, héritiers auto proclamés des fameuses Brigate Gialloblu. Celles de l'Atalanta et de Brescia, tifoserie violentes reconnues pour leur courage et code d’honneur, respectées, même par les Napolitains, la Ternana, la Fiorentina, Milan et Inter, clubs Lombards honni pour leur arrogance « nordiste », au sud, Bari, Cagliari, Reggina (Reggio de Calabre), Pescara et les voisins de la Salernitana et d’Avellino mais surtout, c’est avec les clubs de la Capitale, la Roma et la Lazio que la rivalité est la plus tenace et la plus virulente
Mais ces « nouveaux » groupes de la A, ne vont pas seuls au « contact», ainsi du côté de la Curva B, le groupe historique des Fedayn reste la référence ultra’ Napolitaine… Bien que présent en CB, la mentalité du groupe est totalement différente de celle du CUCB. Par leur fidélité et respect de « doctrines » de base du mouvement ultra, leur refus de toutes compromissions « Estranei Alla Massa » est leur philosophie (« étrangers à la masse »), les « Fedayn » sont non seulement respectés dans les groupes de la Curva A de San Paolo qui leur demande souvent de les rejoindre (ce qu’ils ont toujours refusé de faire jusqu’à présent) mais aussi dans toute l’Italie.
Aujourd’hui les groupes napolitains sont ancrés dans une volonté de retour aux sources même du mouvement, attitude en contradiction (bien évidemment) avec le rigorisme des autorités Italiennes qui n’ont pas hésité à interdire les ultras Napolitains de tout déplacement officiel lors de la saison qui vient de se terminer après les graves incidents de Rome survenus dès la…première journée de Championnat…
« Coerenza e Mentalità » la devise des Mastiffs, fondés en 1991 (quelques 800 membres) symbolise certainement cette relève du mouvement ultra’ Napolitain, tout comme les Teste Matte 87, un des groupes les plus anciens qui continuent de représenter une des frange les plus extrêmes de la « tifoseria » napolitaine : « Rispetto per tutti.....pietà per nessuno », devise sans ambiguïté sur la doctrine du groupe, dont l’accès peut aussi s’apparenter à un « parcours initiatique »…
Depuis 5 ans, un projet unitaire rassemble l’ensemble des groupes de la Curva A derrière une seule et même référence : « Napoli 1926 »…. Les Fedayn ont eux aussi rejoint le projet unitaire, mais en ce qui concerne les décisions internes, chaque groupe conserve son identité. Après des années de contestation interne et de et de soucis judiciaires accrus, les groupes Napolitains ont clairement repris toute leur place et au-delà dans le paysage ultra’ Italien.