Nationalisme, violence, identité, haine,
racisme, hooliganisme, casuals, ultras...Ce sont
quelques-uns des mots que l'on entend fréquemment en parallèle du football de
haut niveau et de l’évolution des comportements des « supporters » les plus
fanatiques, principalement en Europe…
Depuis pas mal de temps, l'attention identitaire dans le milieu du football international se concentre davantage sur le
local et le régional que sur la dimension nationale.
En Italie, par exemple, les matchs entre villes et régions du nord et du sud à
ce niveau sont plus «intéressants» et vécu par les «
tifosi » de manière bien plus passionnée et engagée
que ceux de l'équipe nationale ou justement ces antagonisme régionaux, voire
culturel constituent un frein à un engouement commun.
En Grande-Bretagne, il y a bien le cas écossais, un patriotisme unique par sa ferveur, mais
qui n'explose que lors des matchs de l’équipe nationale, le reste du temps
l’antagonisme religieux (et donc politique) reste prégnant. Les fans et hooligans qui suivent l’Angleterre proviennent
essentiellement des « firms » des clubs des
divisions inférieures et n’effacent pas les rivalités entre les supporters des (grands)
clubs de l’élite… Quant à l’Espagne, les supporters encouragent l'équipe nationale, mais en réalité, la
polémique entre Castillans, Basques, Catalans, Valenciens, Galiciens ou encore
Asturiens les préoccupent bien davantage.
À contrario, là où le nationalisme est
exacerbé, le football fonctionne comme catalyseur. C'est le cas en Europe de l'Est dans les anciens pays du bloc soviétique et
dans les Balkans, entre Serbes, Bosniaques et Croates, mais ce sont précisément des endroits où la pulsion nationaliste est
encore très puissante malgré les antagonismes des clubs les plus puissants
(Etoile Rouge et Partizan Belgrade par exemple en Serbie) ou régionaux (Dynamo
Zagreb et Hajduk Split en Croatie)…
Ainsi, encore une fois, lors des
éliminatoires de la Coupe du Monde 2010, les « ultras » Serbes, Polonais (etc...) ont de nouveau
démontré leur « force de frappe »…La (récente )
tragédie de Belgrade avec le décès d’un supporter français du TFC « battu
à mort » par un groupuscule
(IRR BGD) lié aux Grobari, principal groupe ultra’ du Partizan Belgrade en est un
sanglant exemple…
D'autre part, on va aussi voir se
confronter différents styles de supporters. Les Italiens mettent un point
d'honneur à entretenir leur réputation de supporters bruyants et agités. Les
Anglais sont convaincus d'être les meilleurs supporters du continent, les
Allemands, les Hollandais n'ont rien à leur envier, les Turcs sont persuadés
que leur devoir moral est de se disputer avec tout le monde. Les Serbes,
Croates, Polonais, Russes assurent quasiment un devoir national…À la marge, la France
est assurément le seul pays européen (mondial ?) ou l’hymne national est conspué dans son propre stade…
Ce qu'on ne comprend pas le plus souvent,
c'est que lorsqu’il y a violence, elle n'a de sens pour une bonne part, qu'en
elle-même, elle n'est pas utilitaire. On n'a pas
affaire au phénomène argentin des «barras bravas» qui tentent par la violence d'obtenir des bénéfices économiques, mais à
des gens qui éprouvent à travers la violence un plaisir très profond. Dans le
cas de l'Europe, il arrive donc très souvent qu'une dimension politique
entre en jeu et c'est alors qu'intervient le
nationalisme et le racisme. Il existe une violence d'extrême droite, appuyée
par des discours très radicaux et xénophobes contre l'immigrant, le noir etc...
La violence qui touche le football est donc
aussi (souvent) politique en Europe, plus en Europe du
Sud et dans les pays de l’Est d’ailleurs, que dans le Nord où l’identité
nationale est plus profonde historiquement et sociologiquement. Dans les pays
du Sud de l’Europe, comme en Italie, le positionnement politique est essentiel pour déterminer les antagonismes et les amitiés D’extrême droite, comme
les Irriducibili de la Lazio, dont beaucoup se définissent
comme des fascistes mussoliniens ou communistes staliniens comme se
revendiquent les Brigate Autonome Livornesi. L’Italie foisonne et se nourrit de ces rivalités politico/sportives comme
avant elle abondait de ces Cités/Etats qui se
livraient des guerres de pouvoir au simple nom de leur prestige…
Le contexte italien de « jumelage » fait aussi que certaines amitiés (ou antagonismes) perdurent alors que les tendances politiques des groupes concernés ont pu
évoluer. L’exemple le plus frappant étant la Curva Sud de la Roma, historiquement liée à la gauche populaire
et qui a en (grande) partie basculé vers l’extrême
droite, à l’instar de ses pires ennemis « Laziali ». La disparition du CUCS expliquant en (grande) partie cette situation avec le foisonnement de « petits » groupes autonomes au sein de la mythique Curva du Stade Olympique...
De même en Espagne la connotation politique
apparaît profonde dans un contexte politique fortement lié aux velléités
d’autonomie ou d’indépendance de certaines régions. Nostalgiques du Franquisme
comme à Madrid (Ultras Sur du Real et Frente Atletico), nationalistes régionaux comme au Barça avec les Boixos Nois
indépendantistes Basques de Bilbao ou de Pampelune (Indar Gorri), extrémistes de gauche comme à Séville (Biris Norte) ou à Madrid (Bukaneros du Rayo Vallecano), l’Espagne offre un large panel de la politisation des tribunes populaires
des stades de football.
Paradoxalement, le meilleur exemple de Démocratie reste encore le football lui même. Dans le football, tout le monde est
égal au début de la partie et le meilleur gagne. C'est le principe de méritocratie de n'importe quel système démocratique
qui permet aussi que le plus faible l'emporte parfois sur le plus
puissant…