West Ham United s'appuyait historiquement sur une réalité sociale qui l’avait amenée depuis sa création en 1895 à demeurer la propriété d'une même famille de la bourgeoisie industrielle Londonienne, qui en a assuré sans interruption la direction jusqu’au début des années 90…
Club de la classe ouvrière par naissance, club familial par essence, West Ham a subi lors des deux dernières décennies une véritable révolution idéologique…
Comprendre l’originalité de ce club c’est d’abord comprendre son fonctionnement quasi séculaire qui l’aura amené de la fin du XIXème siècle à celle du XXème tout en conservant un schéma d’entreprise pensée dans son aspect économique selon la plus pure tradition victorienne d’une école morale réglementant la vie et l’activité du club comme celle de ses supporters et de ses membres…
Dans le cadre de la société victorienne, cette manière de construire le club comme une entité fortement intégrée, qui unissait dans une dépendance totale les joueurs et les supporters aux dirigeants, relevait d'une stratégie globale de réglementation de la vie privée des membres des classes populaires (working-class). L'analyse de la crise à la fois économique, sportive et institutionnelle, que connaît le club de West Ham dans les années 1990, montre comment les supporters se sont saisis des valeurs de la famille invoquées par les dirigeants, pour leur donner une extension nouvelle susceptible de justifier une volonté de peser plus fortement sur la politique du club
The Thames Ironworks Football Club a été fondé en 1895 à West Ham, un quartier populeux et misérable de l’Est de Londres par Arnold F.Hills, propriétaire des Forges de la Tamise. L’emblème du club représente deux marteaux qui rappellent ceux que maniaient les ouvriers des forges installées dans les deux arrondissements de l’East End : East Ham et West Ham. La symbolique dépasse cette implantation géographique ; le cri de ralliement des supporters perpétue le passé du club : « Up the Hammers » (allez les métaux où allez les marteaux). A.F.Hills, propriétaire des Forges et pur produit de la bourgeoisie victorienne, incarnait parfaitement les idéaux de sa propre classe. Éduqué à Harrow, puis étudiant à Oxford, champion d’Angleterre du mile, footballeur sélectionné dans l’équipe nationale, végétarien et apôtre de la tempérance, il croyait passionnément aux vertus du sport. Les victoires remportées sur les terrains de football, devaient pour lui, célébrer la grandeur de l’entreprise et sceller sa prospérité.
Hills a présidé au destin du club jusqu’en 1900, date à laquelle celui-ci est devenu professionnel et a pris le nom de West Ham United. Fortement hostile au professionnalisme, Hills sépare clairement les intérêts du nouveau club des affaires de sa propre entreprise. Néanmoins, il assure WHUFC de son soutien en acquérant la moitié des actions et s’engage à acheter une nouvelle action chaque fois qu’une action sera vendue au public. Durant toute sa vie, il aide l’équipe dans les temps difficiles, fera toujours preuve de loyauté, ne cherchera même pas à obtenir un billet gratuit pour les finales de la Coupe et ne fera jamais valoir des droits lors de la distribution des dividendes. Bien que possédant la majorité des actions, ses descendants sont eux aussi demeurés fidèles à la tradition…
West Ham United est fréquemment décrit comme un "family club" et cette expression peut être prise à la lettre. Le club se présente comme une famille patriarcale et autoritaire dominée par une oligarchie qui en assure la gestion et fixe des règles de conduite qui ne peuvent être contestées. Durant ses premières années d’existence, la direction du club est assurée par un petit nombre d’hommes : à partir de 1909 tous les présidents exercent leur mandat jusqu’à leur mort.