Le City of Manchester Stadium accueille ce samedi
17 avril 2010 (12h45), le derby entre les blues de Manchester City et les
reds de Manchester United.
Un match qui n’a jamais atteint l’intensité d’un
Old Firm (Rangers/Celtic) ou d’un choc de la Mersey (Liverpool/Everton). Mais
ce week-end le contexte des deux clubs, avec un Man City installé dans le Big
Four et qui entend y rester et un Man United qui faute de victoire serait alors
irrémédiablement distancé par Chelsea dans la course au titre (sans parler de
la menace d’Arsenal) en font un rendez-vous très attendu à Manchester et dans
toute l’Angleterre…
Historiquement il est pourtant vrai que ce derby
n’a jamais inspiré de grandes envolées parmi les fans de football Anglais.
Pourtant tout avaiit commencé le 12 novembre 1881, quand l’équipe de Newton
Heath bat celle de St. Mark's (West Gorton). Un match parmi d’autres à
Manchester où existent déjà de nombreux clubs de foot. L’équipe victorieuse est
un club de cheminots basé au nord-est de la ville. En 1902, elle troquera son
maillot jaune et vert pour une tunique rouge et sera rebaptisée Manchester
United. L’autre est issue de l’équipe de cricket de la paroisse de St Marks.
Après diverses fusions, elle deviendra Ardwick Football Club en 1887, puis sept
ans plus tard, Manchester City.
Au fil des années, les clubs du tout Manchester
vont entrer dans le rang, au pire disparaître, et seuls deux d’entre eux
garderont leur place dans la cour des grands. Leur rivalité ne va ainsi se
développer que lentement, et prendra son essor lorsque chacun d’eux aura trouvé
son Sweet home. United s’installe dès 1910 à Old Trafford, dans la banlieue de
Stretford. City quant à lui reste fidèle à la ville en prenant place à Maine
Road en 1923. Une connotation religieuse va la première tenter de s’emparer du
derby Mancunien. De par son origine paroissiale, City se voit attribuer une
étiquette protestante, alors que United, parce qu’elle est la première à
accueillir des joueurs irlandais, va recevoir le soutien des communautés
catholiques. Cette opposition sur le terrain religieux ne durera guère, les
repères de chaque communauté n’étant pas aussi nets qu’à Glasgow notamment…
L’opposition entre clubs des riches et clubs des
pauvres ne tient pas non plus la route. Il y a autant de monde issu des couches
populaires que des classes aisées dans un stade comme dans l’autre. La rivalité
entre les deux clubs n’a toujours été que sportive. United affirme haut et fort
qu’il est le club le plus populaire d’Angleterre, mais City prétend détenir le
coeur et l’âme de la ville.
La rivalité des clubs de Manchester n’atteindra à
vrai dire jamais la dimension des derbys de Glasgow ou de Liverpool. Et pour
cause, rarement les deux clubs ont fréquenté les sommets en une même période.
L’ascension de l’un a souvent croisé le déclin de l’autre. Si Manchester City
est le premier à poser son nom sur un palmarès national (la FA Cup en 1904),
United le dépasse bien vite en s’adjugeant deux titres de champion d’Angleterre
(1908 et 1911) et la Cup en 1909.
Dans les années 1930, l’avantage est plutôt en
faveur de City, qui s’adjuge la Cup en 1934 et le titre en 1937. Lorsque les
deux clubs fréquentent la même division, l’un joue à domicile lorsque l’autre
évolue à l’extérieur. Du coup, ce sont souvent les mêmes personnes qui se
rendent un samedi à Old Trafford et l’autre à Maine Road. Peu importe la
couleur du moment que Manchester gagne. Ce voisinage de bonne intelligence perdurera
au lendemain de la seconde guerre mondiale. Old Trafford ayant été détruit par
les bombardements, les deux clubs se partageront Maine Road durant presqu’une
décennie.
En fait, il faudra attendre la fin des sixties
pour qu’apparaisse une réelle et farouche rivalité entre les deux clubs. Dans
les années cinquante, l’émergence des Busby Babes et le drame qui brisa leur
envol construisirent le mythe de United. D’autre joueurs charismatiques et de
belles soirées européennes achevèrent d’en faire l’un des clubs les plus
prestigieux du continent.
Une situation qui agace City au moment où
celui-ci présente également une belle équipe. En 1968, tandis que le United des
Charlton, Best et autres Law conquiert l’Europe, le City de Lee, Bell et
Summerbee s’adjuge le titre de champion d’Angleterre.
Désormais, il n’y a plus de copains : il
faut choisir son camp. C’est dans ce climat que se dispute ainsi le derby du 27
avril 1974. United a complètement raté sa saison et doit absolument battre City
pour se maintenir. Mais il s’incline sur un but de... Denis Law, ancienne
gloire locale passée à l’ennemi.
Dans les années 1990, le derby se transforme en
western avec les règlements de compte entre le Norvégien Alf-Inge Haaland et
l’inévitable Roy Keane. Plus tard, c’est Robbie Fowler, le scouser de passage à
City, qui se charge de rappeler aux fans de United combien Liverpool a remporté
de Coupes d’Europe.
Alors qu’United s’était depuis longtemps
mondialisé avec les capitaux d’outre-Atlantique, Manchester City voulait rester
l’âme et le coeur de Manchester. Durant des années, s’il ne devait remporter
qu’un seul match dans sa saison, c’était bien ce derby face à l’arrogant
voisin.
Le rachat du club en 2008 par le Cheikh Mansour
ben Zayed al-Nahyan, membre de la famille royale d'Abu Dhabi et PDG du
conglomérat Abu Dhabi United Group a désormais placé les citizens de Manchester
dans le même monde élitiste que son puissant voisin…