Le rôle qu’ont joué les compétitions
sportives et notamment le football dans l’éclatement de la Yougoslavie est à la
mesure de la forte considération sociale dont bénéficiait la pratique sportive
et en premier lieu celle du football, sport populaire par essence…
La Yougoslavie valorisait le sport
comme outil de formation de l’homme nouveau, comme tous les régimes
communistes, et le pays a été doté d’institutions et d’infrastructures
sportives de bon niveau. Le sport avait à la fois vertu d’entraînement physique
prémilitaire et d’instrument de propagande politique. Les compétitions
internationales étaient en effet l’occasion d’accroître la réputation du pays.
Depuis la rupture avec Staline en 1948,
la Yougoslavie était largement isolée sur la scène internationale, avant que le
Mouvement des non-alignés ne lui reconnaisse un rôle dirigeant. Les succès
sportifs étaient une illustration des vertus de la voie socialiste yougoslave.
Dans ce cadre, le football a souvent
été le porte-drapeau des passions identitaires et nationalistes,
essentiellement au travers des affrontements entre les clubs Serbes et Croates…
Par ailleurs, les citoyens yougoslaves
ayant la possibilité de voyager librement et de s’établir à l’étranger pour
travailler, des footballeurs professionnels yougoslaves ont très tôt rejoint
les championnats Européens, avides de ces magnifiques techniciens.
Contrairement aux pays du bloc
soviétique, la Yougoslavie socialiste n’a jamais condamné ces « désertions ». Au
contraire, les joueurs et les entraîneurs yougoslaves se voyaient attribuer une
véritable fonction d’ambassadeurs de leur pays.
Durant les années 1990, quand la
Yougoslavie et globalement les Balkans coïncidaient, pour les Occidentaux, avec
violences et guerres ethniques, les footballeurs des Républiques ex-yougoslaves
ont toujours eu à coeur de donner une image positive de leur pays et/ou de
défendre la cause nationale.
Certains poussant leur engagement
(politique et nationaliste) jusqu’à partir combattre tel Vladan Lukic,
international Serbe et actuel Président de l'Etoile Rouge de Belgrade qui fit
un passage par le FC Metz où il signa en 1997 avant de le quitter
(précipitamment) en 1999 pour s'engager dans l'armée Serbe, alors que l'OTAN
venait de bombarder Belgrade…
Les sociétés balkaniques sont aussi des
sociétés traditionnelles où le prestige lié à la force et à l’endurance
physique est très important. L’esprit de compétition est donc naturellement
répandu puisque exprimées à travers le football, la rivalité et
l’identification prennent une importance cruciale quand les identités
nationales se redéfinissent.
À travers le football, les nouvelles
frontières nationalistes pouvaient donc s’exprimer et se consolider.
Ainsi, lorsque commence le processus
d’éclatement de la Socijalisticka Federativna Republika Jugoslavija (République
fédérale socialiste de Yougoslavie) les différentes nations composites
reprendront toute à leur compte le prestige lié au football yougoslave et en
premier lieu la représentation identitaire des principaux clubs…
à suivre...