lundi 12 avril 2010

Yougoslavie : La guerre qui a commencé dans les stades…(Vol III)


Alors que les combats font déjà rage en Croatie, le championnat yougoslave de football 1991 est annulé. De même, l’UEFA décide en août 1991 d’interdire les matchs du championnat d’Europe dans les stades yougoslaves. La presse serbe dénonce le diktat des « serbophobes » invoquant le rôle du « lobby germanique » dans les institutions du football européen. Les sanctions internationales et l’embargo vont représenter un long et douloureux traumatisme pour le football (et le sport) serbe.

L’arrivée de footballeurs serbes réfugiés de Croatie dans les clubs de Serbie et la rupture de contrat de certains joueurs et entraîneurs serbes dans des clubs européens contribuent encore un peu plus à alimenter ce sentiment d’injuste exclusion qui gagne les sportifs serbes. Dans cette situation où la Serbie, le peuple serbe et les sportifs de confession orthodoxe seraient rejetés de partout, la mission de défendre l’honneur et l’identité serbes est plus que jamais confiée aux clubs de football.

Le journal serbe de Croatie Nasa Rec n’hésite pas à écrire : « L’Étoile rouge est bien plus qu’un club de football, elle est le symbole de la serbité »…

Au tournant des années 1990, les différents cercles nationalistes demeurent partagés entre les fidèles de Slobodan Milosevic et les groupes d’opposition, qui se raccrochent généralement à la tradition des tchétniks de la Seconde Guerre mondiale. Le début effectif des combats en Croatie, au printemps 1991, entraîne une totale homogénéisation nationale. Tandis que l’opposition se rallie au pacifisme, y compris le SPO de Vuk Draskovic, les milieux nationalistes serrent les rangs autour du régime. Les supporters sont pleinement engagés dans cette euphorie patriotique.

Un homme va jouer un rôle essentiel dans cette période troublée. Zeljko Raznatovic, alias Arkan. C’est lui qui va entraîner les supporters sur les chemins d’une guerre bien réelle. Arkan a su réconcilier les différents groupes de supporters, et les isoler des passions et des rivalités politiques. En clair, il a su les détourner de toute sympathie pour l’opposition.

L’ascension d’Arkan a été probablement une opération menée des services spéciaux de la police. Criminel de droit commun, il aurait été recruté par la Sécurité d’État (Drzavna Bezbednost, DB) dès le début des années 1980. Au début de l’année 1990, il prend la tête des Delije et entreprend de préparer les ultras de l’Etoile Rouge (et les autres) à la (véritable ) guerre.

À la fin de l’année 1990, il attire l’attention quand il est arrêté à Dvorna Unu, en Croatie, alors qu’il livre des armes aux séparatistes serbes et qu’il passe six mois en prison. Il vient alors de créer la "Srpska dobrovoljacka garda" (la garde des volontaires serbes) dont les hommes ne vont pas tarder à devenir célèbres sous le nom de Tigres. Cette milice va s’illustrer sur les fronts de Croatie et de Bosnie, notamment lors de la prise de Vukovar, en novembre 1991.

Au front, ils n’oublient pas les chansons de la tribune nord du stade de Belgrade, qu’ils entonnent en partant combattre, tandis que la revue du club salue leur « héroïsme ». Le capitaine de l’Étoile rouge, Vladan Lukic (actuel Président du club) se rend à plusieurs reprises visiter les supporters – miliciens, dans leur base d’Erdut, sur la frontière serbo-croate…