L’actualité vient encore de prouver avec la
polémique liée à la présence des barrabravas Argentins en Afrique du Sud que la
puissance de ces groupes en marge des clubs et de la sélection albiceleste est
loin d’être surfaite… À ce titre, la réputation de la 12, la Barra Brava de
Boca Juniors n’est plus à faire…
Depuis sa création « El Jugador Número 12 »
plus communément connue comme « La 12 » a démontré qu’elle était
certainement la Barra Brava la plus passionnée et la plus passionnante du
football Argentin dans le temps mais depuis quelques années, son histoire est
« troublée » par des violences entre factions rivales sur fond de
luttes intestines pour le pouvoir.
Le nom "d’El Jugador Número 12" (littéralement le "12ème homme") trouve son origine en 1925, quand Boca
effectua la première Tournée de son histoire et du football Argentin. La
particularité de ces voyages fut que les joueurs et le staff technique étaient
accompagnés..d’un supporter, ce qui était exceptionnel en cette époque. Adopté
par le groupe de joueurs, ils le baptisèrent « El Jugador Número Doce »,
leur douzième homme ! Ce nom était donc déjà rentré dans l’histoire du
club dans le premier tiers du 20ème siècle…
L’ascension de la « 12 » a commencé avec
l’arrivée à sa tête en 1981 de José Barrita « El Abuelo », après la retraite de Quique "
El Carnicero" qui détenait le pouvoir jusque-là. « El Abuelo » (le
grand-père), surnommé ainsi pour ses cheveux blancs, a été le premier à
utiliser le pouvoir de la « hinchada » comme un moyen de pression…et
de financement…
José Barrita est né le 5 janvier 1953 en Spilinga
(Italie), un village de la région de Cattanzaro dans la province de Calabria où
il a vécu jusqu’à l’age de deux ans lorsque ses parents décidèrent de partir
vivre en Argentine. Comme beaucoup d’immigrés Italien, ses parents débarquèrent
et s’installèrent dans le quartier de la Boca. C’est en 1966 qu’il découvre
véritablement la passion « boquense » et 15 ans plus tard, en 1981, il prend
le pouvoir au sein de la « 12 » en succédant à l'ancien chef, Quique
« El Carnicero » qui avec ses lieutenants « El Alemán » et « El
Viejo » Carrascosa dirigeait la Barra depuis 1973.
José Barrita crée alors une Fondation appelée
"Fundación Jugador Número 12" au travers de laquelle il
« récolte » des fonds pour la Barra. Si les donations plus ou moins
volontaires des joueurs de Boca participent aux frais engagés par la Barra,
« El Abuelo » organise aussi des actions de bienfaisance pour des
hôpitaux pour enfants. Personnage charismatique, José Barrita innove en matière
d’animation dans les tribunes populaires en instaurant les premiers
« tifos », et chorégraphies de drapeaux aux couleurs du club
« xeneize »…
Parallèlement la violence s’installe entre Barras
Bravas et en1994, Barrita est condamné à 9 ans de prison quand un groupe de
« hinchas » proche de lui sera reconnu responsable de la mort de deux
supporters de River Plate tués lors d’affrontement après un
« superclasico » dans la Bombonera. Si sa participation n’a jamais pu
être formellement établie, il sera tout de même condamné, car considéré comme
le chef d'une association « violente et illégale». Il sortira de prison en
décembre 1998 profitant d’une nouvelle loi de remise de peine mais sans jamais
retourner à la Bombonera. Souffrant de graves problèmes pulmonaires, il est
interné à Hôpital San Juan de Dios de Ramos Mejía pour y décéder le 19 février
2001 à 48 ans, victime d’une pneumonie…
Après la chute du « Grand-père », nombreux
sont ceux qui ont prétendu lui succéder, comme El Chueco Reguero, Miguel Cedrón
ou el Cabezón Lancry mais c’est Rafaël Di Zeo, qui prendra définitivement le
pouvoir en 1996. Déjà très impliqué dans le fonctionnement de la Barra, proche
du « pouvoir décisionnel de la 12, la "Fundación Jugador Número
12" était ainsi domiciliée dans la rue Araujo 2781, celle là même où
vivait Rafa, il va avec son frère Fernando allé bien plus loin dans la
surenchère et la violence. Il devient rapidement un personnage incontournable non
seulement au sein de la « hinchada » mais aussi au sein même du club,
où on lui prête plus de pouvoir que le Président du club, amis des joueurs,
proche du pouvoir politique, Rafa impose son pouvoir, parfois s’il le faut par
la menace ou la violence, notamment face aux autres Barra Bravas qui voudraient
contester son hégémonie…
Il est ainsi considéré comme celui ayant conduit
et organisé une sanglante embuscade lors d’un match « amical » à la
Bombonera en1999 au cours de laquelle un « barrabrava » de Chacarita,
Daniel "Pajarito" Benedetti avait été sérieusement blessé par armes.
C’est 8 ans après les faits, que ces incidents rattraperont Di Zeo et qu’il
sera avec son frère Fernando et quatre de ses lieutenants condamné en 2007 à 4
ans et à 3 mois de prison.
Son incarcération, loin d’arrêter la violence ne
fera que la décupler au sein de la Barra de Boca, provoquant une lutte pour sa
succession, qui n’a toujours pas, deux ans plus tard et alors que Rafa vient
d’être autorisé à sortir de prison en régime de semi-liberté depuis le 11 avril
dernier, trouvé de vainqueur incontesté et incontestable…
Trois groupes se sont (principalement) affrontés
pour prendre le contrôle de la puissante Barra Brava du club xeneize. D’une
part, il y avait ceux comme Alejandro Falcigno, Tyson Ibáñez et El
"Melli" Fernández, qui, restés fidèles à « Rafa », souhaitaient
mettre en place un système d’intérim dans l’attente du retour de Di Zeo.
D’autre part, on trouvait un groupe, « Los de Lomas », originaire de Lomas
de Zamora, au Sud de la banlieue de Buenos-Aires, dirigé par Marcelo Aravena,
un ancien lieutenant de El Abuelo l’ancien chef de la 12.
Et enfin, il y avait Mauro Martín, propriétaire
du club Leopardi, de Villa Luro, qui finalement prendra les commandes de la
« 12 » après cette lutte interne, violente et acharnée face aux fidèles de
Di Zeo dont il faisait pourtant partie avant sa condamnation. Il ne lui sera
jamais pardonné sa traîtrise… D’abord allié et soutenu par Richard William
« el uruguayo », ils sont aujourd’hui tous deux opposés dans une sanglante
lutte pour le pouvoir qui chaque semaine monte d’un cran dans la violence et la
haine que se vouent désormais les deux clans…
Mais la sortie de prison de Rafa pourrait bien
(re)changer la donne. Déjà lors de ce Mondial et alors que Di Zeo n’est en
liberté conditionnelle que depuis un mois, son influence apparaît de nouveau
avec la présence en Afrique du Sud de Ramón Ortiz, de Daniel Salto "Cinco", un membre influent de la Bande
de Lomas, d’Eduardo Luis "Loby" Cóceres et de Lana, tous des
anciens de La Doce de l’époque d’El Abuelo qui avaient ensuite suivi Rafael Di
Zeo, le message est clair pour Mauro Martín. L’actuel chef de la barra xeneize
qui d’ailleurs n’a pas fait le déplacement en Afrique du Sud…
Reste à savoir combien de morts seront encore
nécessaires….