Candidate à l’adhésion à l’Union Européenne la Serbie, dont le
dossier a été transmis le 26 octobre pour avis à la Commission Européenne, se
pose toujours la question des responsabilités (internes) concernant les violences
qui ont empêché le match entre l’Italie et la Serbie d’aller à son terme le 12
octobre dernier à Gênes…
Des incidents d’une extrême gravité, qui posent non seulement
un problème d’image pour la Serbie en Europe, mais qui mettent aussi
cruellement en relief les insuffisances de l’État de droit et du gouvernement
serbe à combattre ces violences.
Alors que de nouvelles informations sont sorties ces derniers
jours quant à l’organisation des hooligans pour ce match, la Serbie risque une
exclusion pure et simple, tandis que le gouvernement va devoir prendre de
réelles mesures pour donner une image plus "politiquement correcte" à ses futurs partenaires européens.
De fait, ce soir du 12 Octobre, beaucoup de personnes dans
Belgrade disaient qu’il allait se passer quelque chose et certains éléments
laissaient penser qu’effectivement quelque chose se tramait.
Dès lors, il est évident que ce qui s’est produit à Gênes,
outre sa dimension sportive (précédente défaite humiliante contre l’Estonie,
protestation contre le licenciement de Radomir Antic, attaques contre Vladimir
Stojkovic) ne fut jamais que la seconde mi-temps de la Gay Pride, qui avait eu
lieu deux jours plus tôt, le 10 octobre, dans un Belgrade saccagé par les
groupes de hooligans.
Outre les 17 arrestations effectuées par les carabiniers
italiens, dont celle du leader de ces ultras nationalistes, Ivan Bogdanov, la police serbe a
annoncé l’arrestation de 46 autres hooligans lors de leur retour en
Serbie. Le Ministre de l’intérieur Serbe a même déclaré que les services de
sécurité serbes connaissaient 169 des personnes présentes à Gênes, un chiffre
invraisemblable qui pose la question de la responsabilité des autorités et de
la fédération serbe. Comment ont-elles pu se procurer des billets et voyager
tranquillement jusqu’en Italie ?
Au fil des jours, plusieurs éléments sont venus répondre en
partie à cette question. D’abord, Tomislav Karadzic, le Président de la
fédération Serbe de football a récemment répété que les autorités et la
fédération avaient prévenu la police italienne des risques de débordement, et
fourni des éléments tangibles que les Italiens auraient négligés. Cette erreur
d’appréciation des autorités italiennes a conduit aux dégradations
d’avant-match dans la ville de Gênes sans que la police n’intervienne, puis à
l’entrée au stade des Serbes sans être fouillés, ce qui leur a permis de faire
entrer fumigènes, couteaux et autres fusées en grand nombre.
Ensuite, le quotidien Politika a affirmé que 60 hooligans
avaient reçu environ 200.000 euros venu du crime organisé pour l’organisation,
le voyage, les équipements (plusieurs dizaines d’engins pyrotechniques), et les
incidents à Gênes.
Depuis longtemps déjà, les liens entre certains leaders des
groupes ultras de l’Étoile Rouge, comme du Partizan, le crime organisé, les
organisations d’extrême droite comme Obraz, 1389, ou encore avec les "cléro-fascistes" de l’Église orthodoxe sont connus et plusieurs chef de groupes ultras
font actuellement l’objet de nombreuses enquêtes, sans qu’elles n’aient pu
aboutir…
C’est d’ailleurs le cas d’Ivan Bogdanov, cet ultra de l’Étoile
Rouge de Belgrade, désormais connu pour son rôle dans les incidents de Gênes
mais aussi connu à titre personnel par la Police pour des faits de violence, de
destruction et de possession d’arme et de drogue (pourtant jamais condamné).
Connu encore en tant qu’un des leaders des "Ultras Boys", un groupe
fondé lors de la saison 1996/97 regroupé avec d’autres factions (Red Boys, Heroes, Red Evil...) sous le collectif des "Belgrade Boys". Un groupe dont le vice-procureur de Serbie, Slobodan
Radovanovic, a demandé l’interdiction à la Cour Constitutionnelle il y a déjà
un an. Ainsi, Bogdanov n’aurait jamais dû pouvoir se rendre en Italie si la
justice avait fonctionné correctement (sur l’ensemble des hooligans sur
lesquels la Police a écrit un rapport, seuls 2,4% ont été condamnés à des
peines de prison)…
Enfin, signe de cette proximité (impunité) certains hommes
politiques siègent dans les conseils d’administration des deux grands clubs de
Belgrade, côte à côte avec certains de ces ultras. Ainsi d’autres responsables
des Ultras Boys, comme Marko Vuckovic qui est sous le coup de huit enquêtes, ou
comme Drazen Dragas, impliqué dans des affaires de drogue sont ainsi bien
connus des services de la Police Serbe. Pourtant, tous deux siègent
légalement au conseil d’administration de Zvezda aux côtés de responsables
politiques…