dimanche 7 novembre 2010

SS Lazio – AS Roma : Unique, comme toujours…

Aujourd'hui, Rome et tout le Latium (la région de Rome) seront encore une fois en fusion pour le derby del Campidoglio ou plus simplement le derby Capitolino, car la Lazio "recevra" la Roma dans ce stade Olympique que les deux équipes se partagent.


Et ce 135ème match entre les deux équipes Romaines qui depuis plus de 80 ans se détestent et s’opposent, est d’ores et déjà annoncé comme exceptionnel entre une Lazio "capolista" surprise de la Serie A qui s’affirme match après match comme un sérieux prétendant au titre et une Roma qui n’arrivent pas à chasser ses doutes après un début de saison très difficile…

Les médias s’enflamment, tout comme les tifosi, car le contexte particulier qui fait de cette Lazio un prétendant plus que sérieux au scudetto et de la Roma un reléguable potentiel donne à ce derby un caractère (toujours) unique. Un contexte identique à celui du dernier derby di Roma mais avec des rôles inversés entre des biancocelesti ambitieux et des giallorossi en plein doute…

Si l'on retrouve de nombreux derbys dans toute l'Italie : Derby della Madonnina à Milan, Derby della Mole à Turin, Derby della Lanterna à Gênes, Derby della Scala à Vérone, celui de Rome reste unique de part son environnement spécifique…

Ainsi dans toutes les grandes villes italiennes où apparaissent deux clubs historiquement implantés, l'origine en est souvent identique : Un club bourgeois répond à un club populaire ou inversement. Ainsi l'Inter et le Milan AC, la Juventus et le Torino, la Sampdoria et le Genoa...Dans toutes les grandes villes, c'est la même chose, la même histoire plus ou moins modifiée au fil des années, partout, sauf dans une Ville, et pas des moindres, la Capitale elle-même : Rome

Pourtant, au début rien ne laissé présager qu'il en soit autrement. Ainsi, le 9 janvier 1900, huit gentlemen romains, Luigi Bigiarelli en tête, fondent la SS Lazio sur la place de la Liberté, dans le quartier chic du Prati. Lazio (Latium, ou Lazio en italien, comme la région d'Italie de Rome afin de marquer le caractère régional du club)

Les couleurs choisies, bleu ciel et blanc sont celles du drapeau de la Grèce, patrie du sport en général, des Jeux olympiques en particulier, dont les fondateurs "laziali" entendent intégrer les valeurs. Quant l'emblème de l'aigle, symbole de Zeus, Dieu de l'Olympe, mais aussi des légions impériales, il symbolise par extension la puissance de Rome…

Créée et soutenue par la bourgeoisie romaine, la Lazio sera donc le premier club de foot de la capitale, qui en comptera jusqu'à huit : Roman, Lazio, Juventus, Alba, Fortitudo, Audace, UC Romana, Pro Roma.

Autant d'équipes dont les identités sociales sont bien définies. C'est d'ailleurs cet ensemble hétéroclite de clubs diversement impliqués socialement et politiquement qui servira de combustible à la flambée extrémiste du Calcio romain.

En 1927, Italo Foschi, un dirigeant passé des rangs fascistes chez les nationalistes, membre du Comité olympique italien et Président de Fortitudo, qui a déjà réussi la fusion avec Pro Rome prône maintenant le rassemblement de toutes les formations de la capitale, pour s'opposer à la réorganisation gagnante des clubs du Nord de l'Italie. C'est ainsi que naîtra l'AS Roma, le 22 juillet 1927, l'équipe du peuple...

Seule la Lazio résiste à cette fusion car il est inenvisageable pour les footeux issus des beaux quartiers, de côtoyer ces ouvriers amateurs de Calcio. Après la Seconde Guerre mondiale, les rivalités politico-sportives demeurent et les deux clubs conservent leurs propres identités bien ancrées dans la société romaine. Lazio la bourgeoise, Roma la populaire, qui "glissent" de part et d'autre vers l'extrémisme politique qui va bientôt toucher l'Italie

Dès le début des années 70, le mouvement ultra investit les gradins et se partage les virages du Stade Olympique : le Nord aux Laziale (en 1979), la Curva Sud aux Giallorossi et des "identités" sociétales qui perdurent avec le même antagonisme.

Une fracture se produit lors de la saison 1987/1988 lorsque des ultras plus agressifs prennent le pouvoir dans les rangs des tifosi de la Lazio, les Irriducibili.

De l'autre coté, la Curva Sud du mythique CUCS de la Roma se divise en deux entre le Vecchio CUCS et Le CUCS GAM

Les premiers symboles de l'extrême droite arrivent début 1990. Une faction néofasciste paramilitaire, le «Mouvement occidental», a regroupé les skinheads à Rome. Des supporters des deux clubs s'y retrouvent. En parallèle, le côté violent des actions des ultras se développe…

Depuis lors, la distinction politique et sociale qui existait en tifosi de la Lazio et de la Roma n'a plus lieu d'être et les deux clubs sont en constante surenchère dans la provocation verbale et physique…Ainsi la Roma, qui affiche à l'intention des Ciel et Blanc de la Lazio : «Même couleur, même odeur», en rapport au drapeau israélien ce à quoi les Irriducibili répondent : «Auschwitz votre patrie, les fours vos maisons»

Paradoxalement ces liens politiques n'ont pas rapproché les deux "tifoserie" et l'antagonisme entre les ultras des deux clubs reste le plus violent d'Italie avec certainement le derby della Mole entre le Torino et la Juve et le plus affectif avec celui de Gênes...

Aujourd’hui, ce seront donc (encore une fois) deux cœurs qui battront dans la Ville éternelle…