mardi 28 décembre 2010

Chroniques de Maroni : Juillet 1925, quand les tifosi de Bologne et du Genoa se tiraient déjà dessus…


Tandis que le Ministre de l’Intérieur Italien tente de faire croire que ses mesures liberticides contre les tifosi (et maintenant les étudiants Italiens) peuvent être un moyen de limiter la violence en marge des manifestations sportives, un rapide retour sur une partie de l’Histoire du Calcio permet pourtant de vérifier qu’il ne s’agit pas d’un phénomène nouveau en Italie…

Ainsi c’est entre 1919 et 1925, dans cette période trouble de la montée du fascisme que l’Italie connut sa première vague de violence symbolisée par les incidents survenus en marge de la finale du Championnat d’Italie du Nord opposant Bologne et le Genoa qui a vu l'attribution du titre (et le droit de jouer la finale contre l’Alba Roma) se jouer au cours de cinq rencontres (matchs aller/retour et trois matchs de barrages).

Après que le Genoa l’eut emporté sur la pelouse de Bologne (1-2) et que les joueurs d’Émilie-Romagne aient fait de même à Marassi, le premier match de joué à Milan fut le théâtre de nombreuses irrégularités avec le but égalisateur de Bologne inscrit sur un ballon rendu par les…tifosi Bolognesi massés au bord de la pelouse. L'arbitre annula dans un premier temps le but, mais devant la colère et les menaces du public, finit, après treize minutes de discussion par accorder le but.

La rencontre suivante, qui se termina encore sur un score de parité (1-1) se déroula à Turin sur le campo Juventus du Corso Marsiglia le 5 juillet 1925. Le quotidien sportif de la capitale piémontaise, Il Paese Sportivo, annonçait que "par décision de l'autorité supérieure l'entrée serait interdite aux personnes munies de bâton". Et le lendemain de la rencontre, le même journal rapportait que toutes les précautions avaient été prises pour que la partie se déroule dans le calme : "Autour du rectangle de jeu, un cordon de carabiniers est mis en faction : un militaire tous les trois mètres"…

Un match joué avec des mesures de sécurités renforcées dans le stade Turinois mais qui n’ont pas cependant empêché des incidents de se produire ensuite à la gare de Porta Nuova (Turin) au départ des deux trains spéciaux quand après que des insultes furent échangées entre les deux groupes de tifosi genoani et bolognesi, quelques coups de pistolets furent tirés du train pour Bologne, touchant Francesco Tentorio, un docker du Port de Gênes, touché à la cuisse gauche.

Les commentaires d’une presse soumise à la censure depuis l’établissement de la dictature fasciste en janvier 1925 montrairent que loin d’être un phénomène isolé, les coups de feu de la gare Porta Nuova n’étaient que l’expression la plus poussée de la passion sportive. Le match n'ayant pas abouti à la victoire d'un camp, la lutte continuait, le prochain match était déjà lancé.

Certains journalistes mettaient aussi déjà en cause les clubs qui pour les déplacements réservaient souvent un train entier transportant 500 à un millier de tifosi, non seulement pour satisfaire ces derniers mais également pour ne pas se retrouver en situation d'infériorité en terrain adverse…

Une identification aux couleurs des clubs, en tout cas déjà très forte, puisque à la fin du mois de Juillet, alors que la FIGC avait puni le club émilien d'une très lourde amende de 5.000 lires et qu'elle l'avait sommée de donner le nom des coupables, une assemblée de tifosi réunit plus d’un millier de personnes, Piazza Nettuno dans le centre ville de Bologne pour soutenir le club qui avait repoussé la délibération fédérale.

Malgré cette manifestation de soutien, Bologne avait dû se soumettre à la sanction d’autant que les autorités mirent en place une législation spécifique sur les rencontres sportives.

Le 9 Août 1925 à Milan, Bologne gagnera le match suivant (2-0), joué à huis clos pour éviter tout nouvel incident entre les tifoserie et remportera ensuite deux semaines plus tard son premier Scudetto en dominant largement le Champion de la Lega Sud, la Società Sportiva Alba Roma (4-0 / 2-0) qui deux ans plus tard fusionnera avec d’autres clubs Romains pour donner naissance à l’AS Roma…